Séries

La Vie Devant Elles [Saison 2] : Et l’avenir dans leurs mains

Alors que la première saison avait été l’une des révélations de l’année 2015, La Vie Devant Elles doit maintenant confirmer, le succès ayant été au rendez-vous. Cette fois, la série est donc attendue et l’effet découverte ne pourra plus jouer. L’équipe étant restée la même (Dan Franck et Stéphane Osmont au scénario, Gabriel Aghion à la réalisation), tous les ingrédients sont réunis pour une belle deuxième saison, ce d’autant plus qu’elle était déjà écrite lors de la diffusion de la première. Saura-t-elle pour autant être à la hauteur de nos attentes?

La vie devant elles

La vie devant elles – France Télévisions – 2017

Synopsis : On retrouve nos trois protagonistes, Solana à la tête de l’imprimerie Lambert, Alma en pleines études pour devenir avocate et Caroline qui revient d’un road trip en Afrique du Nord. Cette fois, la trame sociale ne sera plus les mines mais la sidérurgie.

Première chose qui frappe, c’est l’esthétique de la réalisation de Gabriel Aghion. La façon de filmer, l’étalonnage, la photographie rendent la série identifiable au premier coup d’œil, et de très belle manière. Si on l’avait déjà remarqué dans la première saison, la retrouver, deux ans plus tard, c’est encore plus marquant.  La série nous ayant habitué à des sauts dans le temps, on reprend part à la vie des trois filles trois ans après les avoir laissées (soit en mars 1979) sans que cela ne gêne. Il y a une vraie volonté de renouvellement tout en restant dans la continuité de la série. En effet, alors que la première saison s’attachait à décrire le quotidien des mineurs, la deuxième nous plonge dans le monde de la sidérurgie de l’époque, s’inspirant de la crise qui a touché ce secteur dès les années 60, et qui trouvera son paroxysme en 1979, justement. S’ils n’oublient pas les mineurs pour autant, ce changement important fait qu’on sent la volonté de Dan Franck et Stéphane Osmont de prolonger la série en s’appuyant sur ces thèmes (les crises ouvrières) plutôt qu’une continuité classique qui s’attacherait à suivre la suite des sujets traités en première instance. On retrouve le ton de la série, ses valeurs, et on n’est donc pas du tout déconcerté par cette nouvelle approche, au contraire. Car la série manie avec justesse la frontière entre fiction et réalité, chose d’une rare difficulté. Contrairement à Narcos par exemple, qui se veut inspirée de faits réels tout en étant une fiction, prévenant d’ailleurs dès son introduction que beaucoup d’éléments ont été modifiées mais utilisant des documents d’archives pour asseoir sa narration dans une chronologie personnelle, La Vie Devant Elles a choisi clairement la fiction. Chambries n’existe pas, tous les personnages sont fictifs, seuls les personnages politiques de l’époque et les villes (Lille, Lens, Paris…) sont réels. Ici lorsqu’un événement est traités, il le sera à travers la fiction, par une reconstitution. C’était le cas de la première saison, ça l’est une nouvelle fois ici, à travers l’émergence des radios libres ou des manifestations à Denain et à Paris, notamment. Tout en permettant la même réflexion par rapport aux sujets traités, elle évite soigneusement la gêne que provoque la vision de Narcos, à ne pas savoir ce qu’on peut croire ou non.

On retrouve donc avec plaisir nos trois héroïnes, caractérisées chacune par un rapport à l’emploi différent : Solana (Alma Jodorowsky) doit faire prospérer les imprimeries Lambert, Alma (Stéphane Caillard) poursuit des études de droit et Caroline (Lilly-Fleur Pointeaux) se cherche toujours un avenir dans la mode/couture, après un road trip en Afrique du Nord. Un sujet les réunis cependant, la recherche de l’amour. Mais là encore, chacune a son approche. Si Solana décide de multiplier les conquêtes, Caroline se rapprochera de Didier (Jean Gardeil) par défaut à son retour, et Alma tente comme elle peut d’oublier Rodolphe, en choisissant une relation avec un homme marié, l’avocat chez qui elle fait son stage d’étude. Mais tout cela va être remis en question puisque Solana va avoir une histoire d’un soir avec un marocain, Fadi (Corentin Fila), qui va la toucher plus que prévue. Caroline fait le choix du conventionnel et de la facilité – le choix de Didier parce qu’elle le connaît depuis toujours, malgré son amour pour un autre homme. Et Alma va retrouver Rodolphe (Vladimir Consigny). Un choix ici classique, mais toujours efficace, puisque les personnalités toujours aussi fortes de nos trois protagonistes font qu’on a plaisir à les suivre, d’autant plus quand on touche à leurs émotions, puisque c’est le point fort de la série.

Mais le traitement du personnage de Fadi va en faire un stéréotype sériel. Ainsi, si son introduction, comme sa relation avec Solana, amène des problématiques attendues mais intéressantes, la faisant se questionner sur son ressenti différent avec lui, les scénaristes ont décidé non seulement d’en faire un homme que son père a destiné à sa cousine, mais surtout l’homme avec lequel Caroline a vécu une relation amoureuse à Tanger, laquelle a pris fin à cause de sa loyauté envers sa famille et le mariage promis. Si en tant que tel, la série va éviter certains écueils – Solana stoppant sa relation avec Fadi dès qu’elle sait pour lui et Caroline – elle n’avait tout simplement pas besoin de ça, restant toujours très intéressante par ailleurs. D’autant plus que la brouille occasionnée lorsque Caroline apprend pour Solana et Fadi est résolue magiquement entre deux épisodes (3 et 4). A la fin du 3, elles sont ouvertement fâchées, au début du 4, de nouveau meilleures amies. On aurait pu potentiellement passer outre ce moment, mais on ne peut en faire de même pour la fin. Déjà, le mariage entre Caroline et Fadi, est amené de fort mauvaise manière, mais en plus, il plonge dans le cliché du mariage interrompu en pleine cérémonie, avant évidemment la déclaration du « mari et femme ». Alors qu’on se dit qu’il est reparti au Maroc pour se marier avec sa cousine, on retrouve Fadi devant la porte de Solana, essayant de l’embrasser quand elle lui ouvre… Une fin hautement incompréhensible donc, et qui n’est pas à la hauteur du reste de la saison, loin s’en faut. En revanche une relation pas forcément évidente à remettre en place et qui le sera d’une belle manière c’est le couple Alma-Rodolphe, que la phrase que ce dernier prononce pendant le mariage résume parfaitement. Une autre belle phrase sera prononcé par Mr Duparcq (Bruno Todeschini), l’avocat des mineurs de la première saison, maître de stage et amant d’Alma en début de deuxième, à son encontre, là aussi dans le dernier épisode de la série.

Un trait intéressant est la façon dont sont traitées les intrigues construites en première saison. Distillées au travers de trames tout au long de ces six nouveaux épisodes, elles n’en constituent pas le fil rouge principal tout en n’étant pas non plus reléguées au second plan. Un tour de force des scénaristes, par les introductions des personnages de Roger (Jean-Claude Adelin) et Emma Pourtis (Coraly Zahonero) qui vont nous permettre d’en apprendre un peu plus sur le braquage et José Pourtis, le père de Solana. Si par la relation développée par le premier avec Micheline (Sabine Haudepin), comme la seconde qui permettra à Solana de se venger de Vilson (Jérôme Anger), on voit la volonté d’en faire des rencontres au final opportunistes, il n’empêche que les éléments apportés par l’un comme par l’autre sont intéressants et permettent de poursuivre l’histoire par certaines révélations qui ne semblent pas sortis de nulle part.

Enfin, un petit mot sur la musique de Stéphane Zidi et Laurent Sauvagnac, qui transcende chaque instant de la série à travers de mélodies qui, tout en s’appuyant sur la tradition française, possèdent chacune une véritable personnalité et participent pleinement à l’atmosphère si particulière de la série.

Le personnage de Fadi n’est pas vraiment la meilleure idée des scénaristes, tout comme la relation Solana-Vildé (Nicolas Bridet), dans leurs écritures et leurs traitements. Malgré cela, c’est un vrai plaisir de retrouver pour le reste le ton de Dan Franck et Stéphane Osmont, la réalisation de Gabriel Aghion, la musique de Stéphane Zidi et Laurent Sauvagnac, nos trois héroïnes et tout le beau petit monde qui les entoure de Micheline à Rodolphe en passant par le délégué syndical (Alexandre Carrière). Alors qu’il est de coutume et juste de dire qu’une bonne conclusion est importante, car c’est l’idée sur laquelle reste le téléspectateur et qui le marquera, malgré une fin loin de la qualité générale de la série, dès le générique, on n’a qu’une envie : voir la saison 3 !

7,5/10

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La vie devant elles : bande-annonce saison 2

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