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[Interview] De Harry Potter à Star Trek, en passant par The OA, Jason Isaacs nous dit tout

Alors que la saison 3 de Star Trek Discovery démarre ce jeudi 17 janvier aux États-Unis, c’est l’occasion de revenir sur la carrière de Jason Isaacs. Nous avons eu l’occasion de le rencontrer lors du 58ème Festival de la Télévision de Monte-Carlo où il était membre du jury.

Qu’est-ce que cela fait de jouer dans la franchise Star Trek, spécialement pour la télévision ?

J’étais particulièrement sceptique. C’est pourquoi je ne voulais pas y jouer au départ. J’étais un grand fan de Star Trek à l’époque. Il n’y avait pas grand chose à la télévision quand j’étais enfant, ma famille se disputait pour savoir ce que nous allions regarder à la télévision quand la télécommande a été inventée. Mais on n’est jamais disputé concernant Star Trek. Vous pouvez regarder la série peut importe votre âge. En tant qu’enfant, j’adorais les histoires, je suis sûr que mes parents appréciaient l’allégorie politique et mon grand frère y voyait quelque chose de sexy. Quand j’ai entendu qu’il allait y avoir une nouvelle série de Star Trek, je me suis dit que jamais je ne marcherais dans les pas de géant qu’ont effectué William Shatner et Patrick Stewart.

Puis j’ai lu le scénario, les producteurs m’ont pitché l’histoire et tout a changé. C’est une seule histoire, avec beaucoup d’émotion et une grande résonance politique. L’histoire ne repart pas à zéro à chaque épisode, alors, si quelqu’un meurt, cela a de vraies et lourdes conséquences. La série entretient un rapport étroit avec la politique contemporaine, autant qu’ils l’ont fait dans les années 60 avec la série originale.

C’est ce qui vous a convaincu, cet aspect politique ?

Oui. Je voulais que cette nouvelle version ne soit pas comparable avec la série originale. C’est une histoire qui se déroule dans un futur qui ressemble énormément à notre contexte géopolitique avec des sensibilités similaires. Au moment où nous débutions, le monde commençait seulement à se fragmenter d’une façon que Trump a exacerbé. Dans la série, on peut voir énormément de division nourrie par la haine, de dissensions contrecarrées par des figures d’autorité qui présentent une vision du futur où tout le monde travaille ensemble.

Comme dans la série originale ?

Oui, tout à fait. La série est apparue après les luttes pour les droits civiques.

Vous avez dit que l’homme à la maison blanche vous donnait envie de taper contre les murs. Quoi d’autres vous poussent à ce sentiment de frustration ?

Le sectarisme, l’injustice. Quand je vois tout le progrès que nous avons accompli faire marche arrière, la montée des populismes, l’avènement du tribalisme… J’étais avec la Croix Rouge et nous nous sommes rendus en Italie pour venir en aide aux réfugiés syriens. Il y a ces gens incroyables qui ont enduré toutes les monstruosités comme l’esclavage sexuel, le trafic humain, la torture, le viol ou le meurtre et ils font cet impensable voyage pour aller dans un endroit plus sûr. La Croix Rouge fait des choses merveilleuses. Mais le gouvernement italien veut tous les renvoyer dans leur pays. Si vous vous asseyez à côté d’une jeune femme qui a été esclave pendant des années et que fut entourée de morts, de personnes noyées lors de la traversé, tout ce qu’elle souhaite, c’est travailler; apporter sa contribution, d’être une membre active de la société pour enfin être heureuse. Et il y a quelque part, quelqu’un, confortablement assis dans un bureau qui dit “renvoyez ces gens d’où ils viennent”.

Il y a des gens formidables là-bas et j’ai rencontré des personnes merveilleuses à la Croix Rouge, qui retroussent leurs manches et qui font une différence partout dans le monde. Il y a des choses merveilleuses qui se passent dans le monde. Vous pouvez penser le contraire par ce que vous disent les journaux et le fait qu’on se concentre toujours sur les catastrophes mais il y a de belles choses tout de même. La mortalité baisse. Alors oui, c’est trois pas devant, deux pas en arrière, mais vous pouvez essayer de voir la lumière où elle est et ne pas sombrer dans le déni. Trouvez un endroit où vous pouvez faire la différence. Et ma profession finalement très stupide, triviale et narcissique, c’est tout aussi vrai, les histoires que l’on raconte peuvent faire la différence. La fiction peut être inspirante.

Est-ce que vous avez l’impression de toujours jouer des méchants ?

Non, du tout ! Je ne joue pas toujours des méchants mais des êtres humains complexes. Sinon, je ne prendrai pas ces rôles parce que cela ferait de moi un acteur médiocre. Dans Harry Potter, le personnage de Lucius Malfoy est avant tout raciste. C’est un raciste qui pense que le monde était meilleur quand des gens comme lui le gouvernait. Et c’est un homme identique qui réside à la Maison Blanche actuellement. Mon personnage dans The OA cherche à tuer la mort. C’est ce qu’il cherche à faire et il pense que la fin justifie les moyens mais il a conscience que ces moyens sont immoraux. Il paye le prix de son choix. Il sait que ce qu’il fait n’est pas bien, il ne prend aucun plaisir à faire souffrir les autres. Mais les bénéfices pour l’humanité sont tellement importants. Si quelqu’un se présentait à vous en vous disant qu’il a guéri le cancer, est ce que vous lui demandez ce qu’il a dû faire pour y parvenir ? Alors oui, il y a quelques personnes dans son sous-sol mais tout ce qui concerne la mort changera s’il s’avère qu’il a raison. Alors je n’ai pas l’impression de jouer un vilain. Je n’essaie pas de montrer quelqu’un de prétentieux mais quelqu’un de bon. J’aime l’idée de personnages à trois dimensions, c’est pourquoi je les choisis.

Est-ce que vous aimeriez jouer à nouveau Lucius Malfoy ?

Oh mon dieu, j’adorerais mais pas pour les raisons que vous pensez ! Mon travail actuellement n’a aucun rapport avec ce que vous voyez. J’adore mon métier, j’adore traîner avec des gens, explorer ce que les autres peuvent penser et ressentir tout ce processus de création. Ensuite, le succès est finalement moins important que la sensation de le faire. J’aimerais continuer à travailler donc, c’est toujours agréable d’avoir du succès de temps en temps. Mais mon travail ce n’est pas le succès, c’est de la création.

Vous n’avez pas été déçu de l’échec de Peter Pan ?

J’ai connu des grands succès. Je ne dirai pas que je n’ai pas été déçu que le film n’ait pas remporté un succès, parce que cela concerne aussi le travaille de nombreuses personnes. Et je pense aussi que c’est probablement l’un des meilleurs films que j’ai fait et il a un incroyable effet sur les générations qui l’ont vu. Mais il n’a pas aussi bien marché qu’espéré. Mais cela ne va pas changer ma vie, ma vie est géniale, j’ai un enfant, une femme qui m’aime… J’ai acquis suffisamment de sagesse aujourd’hui pour savoir qu’un peu plus d’argent ou de célébrité ne vous rendra pas plus heureux. Alors aussi longtemps que je pourrais travailler, ce sera parfait.

Que pouvez-vous nous dire à propos de la seconde saison de The OA ?

J’adore The OA, c’est probablement l’une de mes séries préférées. Je trouve que Netflix a fait quelque chose de particulièrement intéressant : ils avaient toute une campagne de publicité prévue et finalement, ils ont décidé de ne rien faire, de mettre à disposition la série et laisser les gens en parler. Parce que la série défie tous les genres. Vous êtes autant devant un thriller, une expérience spirituelle et mystique… et même quand vous êtes devant, vous pensez comprendre de quel genre est la série, vous enchaînez avec l’épisode suivant et c’est quelque chose de complètement différent. Une partie du plaisir vient de la surprise, de la découverte. Si vous me demandez de décrire la blague que je vais vous raconter, elle ne sera pas drôle. Alors si je vous apprends ce qu’il va se passer dans la saison deux, l’aventure sera ruinée.

Brit Marling et Zai Batmanglij ont toute l’histoire dans leur tête. C’est rarement le cas avec ce genre de série où les auteurs prétendent qu’ils ont construit toute leur mythologie alors qu’ils bataillent pour la raconter. Mais eux, ils ont déjà tout en tête et c’est merveilleux, alors j’espère qu’ils pourront la raconter dans son intégralité parce que c’est vraiment quelque chose !

Avez-vous été déçu par l’annulation de Awake ? Auriez-vous aimé avoir une seconde saison ?

Oh oui. J’ai été particulièrement déçu parce que nous avons tous déménagé aux États-Unis. On a mis les enfants à l’école, acheté une maison, une voiture. Je sais qu’il y a toujours un risque. Cette année-là, j’ai reçu plusieurs propositions de pilotes auxquels je n’ai donné suite. Et les exécutifs de NBC m’ont fait parvenir ce scripte qu’ils avaient du mal à décrire et encore moins à vendre parce que cela ne ressemblait pas à de la télévision de network. Alors j’ai été intrigué et je l’ai trouvé fantastique. Cela ne ressemblait à aucune série, alors nous avons tourné un pilote, qui a été validé pour une saison entière. Ce fut éreintant. J’étais dans toutes les scènes, évidemment, et mon cerveau avec ces sortes d’effondrement émotionnels à chaque scène… La série a malgré tout trouvé un public dévoué. Mais ce n’était pas pour un network mais plus pour une chaîne câblée. C’était vraiment une série brillante, j’ai été très, très déçu par son annulation. J’ai joué dans Dig ensuite et Dig a été annulée. Des portes s’ouvrent, d’autres se ferment et vous ne pouvez aller que de l’avant.

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