Séries/Tout commence avec un pilot

[Pilot] Good Girls Revolt : Rébellion en gestation

Good Girls Revolt est la dernière née d’Amazon. Développée par Dana Calvo, elle revient de manière romancée sur un événement significatif de l’histoire du féminisme aux Etats-Unis, dans les années 70. La série saura-t-elle embarquer le public dans cette révolte féministe ?

Good Girls Revolt - Amazon - 2016

Good Girls Revolt – Amazon – 2016

Synopsis : A la fin des années 1960, la vie d’un hebdomadaire national en pleines revendications pour les droits des femmes.

Amazon n’a pas de chance, quand même… Sa plateforme de streaming a beau cumuler les séries originales depuis presque aussi longtemps que Netflix, tout le monde a tendance à oublier tout ce qu’elle peut produire. Exception faite de Transparent (quoique la saison 3 est un peu passée inaperçue). Et quand ses séries finissent par vraiment générer du buzz, c’est pour être descendues par la critique. N’est-ce pas, Woody Allen ? Même The Man in the High Castle, certainement la plus grosse production d’Amazon, n’est pas devenue un phénomène sur le long-terme. La saison 2 changera peut-être la donne, remarquez… mais à l’heure actuelle, alors que la campagne promo est déjà lancée, je n’ai pas l’impression que l’excitation se fasse particulièrement ressentir. La dernière création originale en date, Good Girls Revolt, ne devrait pas avoir beaucoup plus de chance. Un period drama un peu intello, sans aucun grand nom en tête d’affiche ou concept innovant ? C’est perdu d’avance. Et c’est dommage, parce qu’à défaut d’être brillant, son pilot est plutôt réjouissant.

GGR (sûrement l’acronyme de série le plus ironique qui soit depuis OUAT) est donc un period drama inspiré de faits réels et adapté du roman The Good Girls Revolt de Lynn Povich, ex-journaliste à Newsweek, qui raconte comment elle et ses collègues ont poursuivi le journal en 1970 pour discrimination sexuelle. Dans le cas de la série, l’action prend place à la fin des années 60, au sein du journal fictif News of the World, à New York et se concentre sur le parcours de 3 jeunes « researchers », des assistantes de journalistes.

L’époque dépeinte par Good Girls Revolt est un chapitre mouvementé de l’histoire des Etats-Unis, marqué par les mouvements sociaux, la guerre du Vietnam, les protestations d’étudiants, les hippies, la contre-culture… et bien sûr, c’est l’aube de la révolution sexuelle. Le girl power est en marche et s’il y a bien une chose que la série cherche à montrer, c’est ça. Nous n’en sommes qu’au commencement avec le pilot et c’est avant tout sur le cas du journal que la série se concentre mais le propos féministe est déjà souligné, surligné et encadré. Rien que sur ce point, GGR diffère de Mad Men, le period drama des 60s par excellence. Quand pour Mad Men, les droits des femmes, leur place au travail, le sexisme ambiant sont des thèmes parmi de nombreux autres constituant le large univers de la série, GGR, elle, en fait son principal cheval de bataille et se veut très claire à ce sujet-là.

Au fond, le pilot semble suggérer que Good Girls Revolt est plus proche de The Newsroom puisque c’est aussi de journalisme qu’il s’agit. Pour les dialogues étourdissants et le walk-and-talk typiques des séries de Sorkin, on repassera mais GGR reprend en tout cas le principe du traitement d’actualités réelles par les personnages de la série. Cela s’avère, à mon sens, plus approprié ici que dans The Newsroom puisque les news traitées sont déjà devenues des événements historiques. GGR bénéficie ainsi de plus de distance pour les aborder correctement et sans que cela perturbe les spectateurs.

L’introduction à l’univers de la série s’avère en tout cas efficace, nous plongeant directement dans l’action avec les débordements du concert d’Altamont, un concert emblématique de la contre-culture en Californie, que News of the Week cherche à couvrir. Les enquêtes de la pétillante et intrépide researcher Patti Robinson pour découvrir l’identité des agresseurs d’un fan au concert sont l’occasion de voir la réalité de son travail et de faire la rencontre de la galerie de personnages qui l’entourent.

L’avantage de la série, c’est qu’elle peut compter sur les interprétations de son trio d’actrices principales pour rapidement rendre leurs personnages attachants. Genevieve Angelson, plus particulièrement, est pour moi une jolie découverte. Elle donne une énergie et une fraîcheur à Patti qui l’aident à se faire remarquer et permettent de lui pardonner plus facilement quand elle ne respecte pas ses engagements, notamment avec son copain Doug. Ses collègues ne déméritent pas non plus. Erin Darke joue une researcher timide qui s’avère drôle et touchante et Anna Camp est en mode pilote automatique en beauté pimpante des 60s mais c’est toujours un plaisir de la revoir. Le personnage de cette dernière aurait d’ailleurs mérité plus d’approfondissement, surtout quand on connaît son talent.

Ce qui est aussi légèrement regrettable c’est que les liens entre les personnages du trio principal ne sont pas énormément soulignés et on ne perçoit pas vraiment de complicité entre elles. La série se focalise en fait plus sur le personnage de Nora Ephron, (excellente Grace Gummer), qui fait ses débuts à News of the Week mais qui n’est en réalité que de passage dans le pilot. Elle sert alors surtout d’outil narratif pour présenter le journal et expliciter le programme féministe de la série. En soi, cela fonctionne et le focus sur elle permet de donner un vrai poids dramatique à l’événement clé du pilot censé inspirer les femmes du journal. Toutefois, cela se fait au détriment du temps qui pourrait être accordé au développement des relations des femmes qui sont les véritables héroïnes de la série. C’est dommage dans le cadre d’un récit qui veut raconter une « révolte ».

On comprend bien quelles seront les raisons de la révolte, à savoir les conventions sexistes de News of the Week qui discriminent les femmes en les empêchant de devenir reporters. Mais il m’est difficile, pour ma part en tout cas, de croire à ce stade à la possibilité de la mise en place d’un mouvement, vu que les personnages féminins ne semblent pas particulièrement proches. J’espère du coup que les épisodes suivants rattraperont cela.

En bref, Good Girls Revolt n’est pas exactement la digne héritière de Mad Men mais elle est en tout cas plus accessible et focalisée sur l’action, ce qui en fait au moins un récit divertissant. Elle a aussi le mérite de présenter un autre genre de period drama qui donne l’opportunité à des personnages féminins d’être sur le devant de la scène pour nous raconter avec entrain une partie de l’histoire du féminisme. A l’heure où une femme est sur le point de devenir présidente des Etats-Unis, c’est toujours bienvenu pour réaliser le chemin parcouru.

6,5/10

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